N88

Internet, droit fondamental


Un bien commun

Le débat sur la loi Hadopi aura eu ce mérite de conduire à la reconnaissance de l'accès à Internet comme un droit. La censure du Conseil Constitutionnel le 10 juin dernier a effectivement mis en échec le projet de suspension de la connexion à Internet par une autorité administrative. Comme l'indique Patrick Bloche (PS), "le Conseil Constitutionnel a affirmé que la liberté de communication et d'expression nécessite désormais que soit reconnu un droit d'accès à Internet. Ce droit est ainsi devenu un droit fondamental dérivé de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. (...) Il est ainsi désormais reconnu que l'internaute, via Internet, est titulaire à la fois du droit de s'exprimer et de communiquer".
Internet devient alors un bien commun auquel il faut garantir la liberté d'accès. Se pose rapidement la question du rôle qu'est amenée à jouer Internet dans la diffusion du savoir culturel comme dans la vie politique. Les interventions médiatiques fustigeant Internet (celle de Jacques Séguéla est la plus fameuse, Internet étant pour le publicitaire "la pire saloperie que les hommes aient jamais inventée"...) se sont multipliées ces derniers temps. C'est oublier que dans ce débat particulier sur Hadopi, de nombreux internautes se sont passionnés pour la bataille politique et juridique qui se déroulait sous leur yeux, en suivant grâce à Internet le débat à l'Assemblée Nationale. Internet a engendré un processus de politisation insoupçonné. Ce n'est certainement pas le JT du soir qui permettra aujourd'hui d'assurer pleinement cette fonction d'information, de réflexion, de prise de conscience. De même, on aurait tort d'oublier qu'Internet permet l'exercice réel de la liberté d'expression par tous, comme le souligne Benjamin Bayart (président de French Data Network). Les autres médias ne donnent pas vraiment la possibilité de s'exprimer, ils donnent seulement accès (ou sont sensés donner accès...) à l'information. Ce qui fait dire à Benjamin Bayart : "L'imprimerie a permis au peuple de lire, Internet va lui permettre d'écrire".


De la neutralité du réseau

La neutralité du réseau est un enjeu essentiel de la bataille Hadopi, car elle a pour corollaire le respect de la liberté d'expression. Le réseau est neutre lorsqu'il n'y a aucune altération des contenus. Benjamin Bayart explique clairement l'enjeu de cette neutralité : "Comment savoir si le texte que je suis en train d'écrire sera bien reçu, non modifié, par mes lecteurs ? Comment savoir s'il sera modifié, et si oui par qui ? Moi, je vois bien ce texte tel que je l'ai posté. Tant qu'Internet est neutre, et que donc tout le monde voit le même Internet, alors tout le monde voit mon texte tel que je l'ai publié. Sitôt que le réseau n'est plus neutre, je n'ai aucun moyen de savoir ce que voit mon voisin. Donc, sur un réseau non-neutre, je ne peux pas exprimer librement ma pensée, et donc l'exercice pratique et réel de cette liberté est remis en cause". Ainsi, pour Benjamin Bayart, la bataille Hadopi n'est que le premier épisode dans ce combat mené pour la préservation de la liberté d'expression sur le net.


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