N88


C'est demain vendredi 2 octobre que le peuple irlandais est appelé à se prononcer à nouveau sur le traité de Lisbonne. Nous avons déjà eu l'occasion de nous interroger sur la pertinence démocratique d'une telle démarche, alors que le peuple irlandais a déjà rejeté le traité le 12 juin 2008. De nombreux sondages semblent prédire cette fois-ci la victoire du oui. Quelques remarques s'imposent sur ce nouveau vote, et sur ce qu'il nous apprend de notre Union Européenne.

Tout d'abord, on ne peut qu'être effrayé de l'anesthésie des démocraties européennes. Les médias français zappent totalement cet événement, préférant ressasser les faits divers. L'expression souveraine d'un peuple par le vote, sensée être un moment privilégié de la vie politique, n'intéresse plus grand monde. En Irlande, l'effervescence est bien là, mais le camp du oui bénéficie d'une meilleure représentation médiatique (comme en France en 2005 d'ailleurs). La commission européenne ne ménage pas sa peine pour convaincre les Irlandais. Elle est allée jusqu'à publier un livret pour résumer le traité de Lisbonne, en toute objectivité bien entendu...

C'est que l'enjeu est de taille. Un nouveau non des Irlandais provoquerait un séisme politique sans précédent. Il ouvrirait une brèche aux contestataires. Contrairement à ce que l'on voudrait nous faire croire, le traité de Lisbonne ne fait pas l'unanimité. Un article du Monde d'aujourd'hui signé Marion Van Renterghem rappelle à juste titre que "les présidents tchèques et polonais rechignent à signer le traité de Lisbonne, alors que les conservateurs britanniques menacent de tout reprendre à zéro s'ils arrivent au pouvoir au printemps". Sans parler des juges allemands de Karlsruhe qui ont pointé du doigt en juin dernier "le déficit démocratique structurel " européen, affirmant la nécessité d'une loi garantissant les prérogatives du Parlement national (lire à ce sujet l'édito du Monde Diplomatique d'Anne-Cécile Robert).

Pour faire adopter le traité, la commission européenne mise sur l'évolution de la situation depuis juin 2008. Des modifications ont été apportées au texte d'origine, notamment du point de vue du maintien de la neutralité militaire irlandaise. Des concessions qui à vrai dire sont bien faibles par rapport à l'ensemble du texte. Mais c'est surtout la crise économique qui pourrait bouleverser le scrutin. L'idée qu'un rejet du traité de Lisbonne aggraverait la crise avec l'isolement de l'Irlande a fait surface durant la campagne. Difficile de mesurer l'impact de la situation économique sur le comportement des Irlandais demain. Une chose est sûre : quel que soit le résultat, l'UE sortira décrédibilisée et affaiblie de cette affaire par son insistance et sa violation des règles démocratiques.

Sources :
- article du monde :
"La crise, meilleure alliée du traité de Lisbonne en Irlande"
-
article plus engagé sur Agoravox.
0 Responses

Enregistrer un commentaire